La Pagode, un cinéma indépendant à l’aube du numérique

Le cinéma La Pagode, de nuit ©La Pagode

L’un des plus beaux et des plus anciens cinémas de la capitale s’apprête à franchir le cap du numérique. Révolution technologique ou transition inéluctable ?

Avec son architecture japonisante et son jardin à l’orientale, le cinéma La Pagode, situé en plein cœur du 7ème arrondissement de Paris, a peu de chance de passer inaperçu. Ce vendredi, des lycéens encore assoupis patientent dans la rue de Babylone. Ils viennent voir Le Silence de Lorna, des frères Dardenne, l’un des derniers long-métrages à être projeté en 35 mm à La Pagode.

Le hall de La Pagode, décoré pour Noël ©Camille Poirier

Pendant qu’une intervenante présente le film aux élèves, Olivier  Cousin, directeur de l’établissement, gravit un escalier tortueux en direction de la cabine de projection. Une grande pièce grisâtre où s’amoncèlent bobines, cartons, affiches, vélos et bouteilles d’eau.

« Nous allons pouvoir conserver nos projecteurs 35 mm en plus des numériques car les cabines sont assez grandes », explique-t-il tout en installant la pellicule. D’ici quelques semaines, ces gestes n’auront plus de raison d’être : La Pagode sera équipée en numérique à partir du mois de janvier 2012. « On est obligés de passer au numérique dans la mesure où les copies 35 mm ne seront plus disponibles. D’ici septembre, 90% des salles seront numérisées ». Le projecteur se met en marche dans un ronflement bruyant. « C’est le bruit magique ! », s’exclame Olivier Cousin.

Projecteur 35 mm en fonctionnement ©Camille Poirier

Une fois que les premières images ont fait leur apparition sur l’écran, il n’y a plus qu’à patienter pendant 1h45 avant d’éteindre le projecteur. En attendant, direction l’ancien salon de thé de La Pagode où ont été installés quelques fauteuils, une petite cuisine et un projecteur 16 mm en guise de décoration. Ce salon, douillet et sympathique, n’est plus accessible au public depuis une quinzaine d’années pour des raisons de sécurité.

Salle dite « japonaise » datant du XIXe siècle ©Camille Poirier

Classée monument historique, La Pagode est l’un des plus anciens cinémas de Paris. Le bâtiment, construit au XIXe siècle, abritait autrefois une salle de bal, cadeau du directeur du Bon Marché à son épouse. Ce n’est qu’en 1931 qu’il devint un haut lieu du septième art.

Pour les cinémas indépendants, le coût du passage au numérique n’est pas négligeable. Environ 70 000 € par écran, parfois plus s’il est nécessaire de faire des travaux dans la cabine de projection. Les salles classées Art et Essai et les petits cinémas bénéficient d’aides du CNC, des collectivités territoriales et des distributeurs, mais ces aides fondront comme neige au soleil une fois que toutes les salles auront été numérisées.

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Le Silence de Lorna est sur le point de se terminer, il faut retourner en cabine de projection pour éteindre l’appareil et ranger la bobine. A La Pagode, personne ne paraît particulièrement bouleversé par l’arrivée du numérique. « Je ne pense pas que cette transition changera grand-chose pour nous. C’est toujours de la projection, reconnaît M. Cousin. Il y a beaucoup de mystères, on est un peu attentistes, on verra ce que ça va donner ».

A 13h30, une poignée d’habitués attend patiemment que le cinéma ouvre ses portes. La révolution numérique les laisse sceptiques : « Les grains de l’image et la bobine qui crachent vont me manquer… mais si l’avenir est en marche, il en faut bien pour tout le monde, non ? ».

Camille P.

Version longue du reportage à découvrir sur iletaitunefoislecinema.com

Cet article a été publié dans Divers. Ajoutez ce permalien à vos favoris.

4 commentaires pour La Pagode, un cinéma indépendant à l’aube du numérique

  1. clem dit :

    tu m’enverras la version complète ? c’est intéressant ! bisou
    Clem

  2. florence de la Patellière dit :

    La « pagode » rouge photographiée ici n’est pas la façade du cinéma « La Pagode ». Il s’agit de celle d’une construction située rue de Coucelles à Paris

  3. florence de la Patellière dit :

    Rue de Courcelles, pardon!

  4. Autant pour moi, c’est rectifié 🙂

Laisser un commentaire